L'heure juste
AVRIL 2025
VUES SUR LE BAPE
LES RÔLES DU BAPE
À la recherche de la vérité
Le BAPE joue quatre grands rôles: informer, consulter, enquêter et aviser. Cette série d’articles de L’heure juste explore en détail chacun de ces rôles. Dans cette édition, nous décortiquons le rôle d’enquêter.
Enquêter est un rôle clé attribué aux commissions du BAPE. Si la Loi sur la qualité de l’environnement indique que le Bureau a notamment pour fonction d’enquêter sur toute question relative à la qualité de l’environnement que lui soumet le ministre, elle donne aussi des pouvoirs particuliers aux commissions d’enquête formées par le président de l’institution. Pour les fins des enquêtes qui leur sont confiées, les membres du Bureau possèdent les pouvoirs et l’immunité des commissaires nommés en vertu de la Loi sur les commissions d’enquête, à l’exception de celui d’imposer une peine d’emprisonnement.
Ainsi, les rapports du BAPE sont fondés sur les opinions citoyennes émises lors des consultations publiques ainsi que sur l’enquête faite par les commissaires. Ce sont deux composantes complémentaires et indissociables qui contribuent à enrichir l’analyse des commissions et qui procurent une forte crédibilité aux rapports du BAPE.
De vastes pouvoirs
Concrètement, les commissaires possèdent de vastes pouvoirs afin de mener leur enquête publique et de s'acquitter de leur mandat. La Loi attribue aux commissions des pouvoirs d’assignation, c’est-à-dire qu’elles peuvent forcer une personne à témoigner ou à déposer des documents existants. Le droit d’assignation ne transforme pas pour autant l’enquête en un tribunal quasi judiciaire et ne donne pas lieu à un procès. Il donne plutôt un rôle prédominant aux commissaires dans l’établissement des faits.
Les commissions détiennent aussi le pouvoir de condamner une personne pour outrage au tribunal afin de faire respecter ses assignations. Par exemple, une personne est passible de sanction si elle refuse de répondre aux questions des commissaires, si elle refuse de produire les documents en sa possession ou sous son contrôle ou si elle entrave le cours normal de l’administration de la commission ou porte atteinte à l’autorité ou à la dignité de la commission.
«Ce sont de grands pouvoirs que nous utilisons toutefois avec prudence et parcimonie, souligne Joseph Zayed, membre au BAPE depuis 1992. Je pense même que, dans l’histoire du BAPE, certains de ces pouvoirs n’ont jamais été exercés. En revanche, celui que nous utilisons régulièrement, et qui me semble le plus significatif, est celui d’exiger le dépôt de documents confidentiels, que ce soit de la part de l’initiateur du projet ou de personnes-ressources. C’est un pouvoir immense.»
Marie-Eve Fortin, membre du Bureau depuis 2021, abonde dans le même sens. «Règle générale, nous sommes capables de faire notre travail sans recourir à ces pouvoirs. On ne veut pas être obligé de forcer quelqu’un à se présenter en séance publique ou à répondre à une question. La personne risque de ne pas collaborer. Nous faisons tout notre possible pour que les gens collaborent, afin d’éviter d’avoir à les y contraindre.»
Une rigueur implacable
L’enquête réalisée par les commissions est avant tout basée sur la recherche de la vérité et sur la rigueur. Pour découvrir tous les faits pertinents et satisfaire aux critères d'impartialité et d'indépendance, l'enquête doit être menée de façon approfondie. Les commissaires doivent vérifier le bien-fondé des arguments et la véracité des faits qui leur sont exposés.
«Pour les commissions, la rigueur est extrêmement importante, affirme Joseph Zayed. Lorsque l’on affirme que nous cherchons la vérité, cela signifie que nous nous efforçons d’obtenir les informations les plus actuelles et les plus crédibles afin que la commission puisse examiner le dossier avec toute la rigueur nécessaire et formuler des avis qui ne pourront être remis en question. Si une expertise fait défaut au sein de la commission ou de son équipe, nous irons la chercher auprès de ministères, d’organismes spécialisés ou d’autres sources compétentes.»
Le plus important pour Joseph Zayed est de ne pas se limiter à une seule réponse, une seule personne ou un seul expert. «Il faut toujours que l'on s'assure de valider l'information, d'avoir une contre-expertise. C'est la raison pour laquelle nous invitons des personnes-ressources au cours des séances publiques.»
Pour Joseph Zayed, qui a présidé plus d’une vingtaine de commissions d’enquête et publié plus d’une centaine d’articles scientifiques au cours de sa carrière, la crédibilité d’un rapport est déterminée par son maillon le plus faible. «La moindre erreur, même anodine en apparence, peut entacher non seulement le rapport lui-même, mais aussi la commission et l’institution. Il ne faut jamais rien tenir pour acquis, jamais se satisfaire d’une information sans en avoir vérifié la solidité. Il faut aller au fond des choses avec une rigueur à toute épreuve.»