L'heure juste
MAI 2025
VUES SUR LE BAPE
LES RÔLES DU BAPE
Aviser pour éclairer la prise de décision
Le BAPE joue quatre grands rôles: informer, consulter, enquêter et aviser. Cette série d’articles de L’heure juste explore en détail chacun de ces rôles. Dans cette édition, nous décortiquons le rôle d’aviser.
Les avis formulés dans les rapports du BAPE s’appuient sur deux rôles expliqués précédemment dans l’infolettre, soit consulter et enquêter. La consultation et l’enquête sont en effet les piliers qui permettent de formuler des avis pertinents, solides et rigoureux visant à éclairer la prise de décision gouvernementale.
Les préoccupations soulevées par les participantes et participants lors des consultations publiques alimentent invariablement les avis formulés par les commissions. «Il y a toujours des constats ou des avis qui découlent des préoccupations soulevées par le public, sinon, notre rôle de consultation ne serait pas accompli jusqu'au bout, affirme Antoine Morissette, membre à temps plein au BAPE depuis 2022. À partir du moment où quelqu’un soulève un drapeau rouge, une préoccupation ou un risque, nous faisons enquête et, s’il y a lieu, nous formulons un constat ou un avis.»
«Aviser est avant tout un rôle-conseil, explique M. Morissette en soulignant que ce rôle est à la fois vaste et très concret. À court terme, nous avons la chance de pouvoir influencer positivement les projets en les bonifiant. À plus long terme, nous pouvons aussi contribuer à faire évoluer les politiques publiques.»
Selon Marie-Eve Fortin, membre à temps plein au BAPE depuis 2021, le rôle d’aviser consiste avant tout à transmettre au ministre l’information la plus pertinente pour éclairer sa réflexion. «Le ministre n’a pas besoin de tout savoir. L’essentiel est de cibler les éléments les plus significatifs, ceux qui lui permettront de formuler une recommandation éclairée au Conseil des ministres, qui rendra la décision finale sur le projet.»
Des constats et des avis
Les rapports du BAPE contiennent des constats et des avis. Si le constat est la conclusion tirée de l’examen objectif d’une situation, l’avis est l’opinion de la commission concernant divers enjeux entourant le projet.
Pour Antoine Morissette, les constats constituent la synthèse de l'analyse. «C'est le fil d'Ariane qui permet de suivre le cheminement de la commission jusqu'à la formulation des avis qui prennent en considération les principes du développement durable.»
Doyen des membres du BAPE, Joseph Zayed estime que certains constats peuvent parfois être tout aussi percutants que des avis. «Par exemple, lorsqu’une situation invraisemblable est observée, le fait de formuler un constat à ce sujet peut devenir un élément puissant qui se répercutera dans un avis par la suite. Chaque avis est la conclusion d'un argumentaire. Il y a donc une sorte de gradation, un entonnoir.»
«Nous devons également nous assurer que chaque avis soit viable, ajoute Antoine Morissette. Tout ce qui est intéressant n'est pas nécessairement important. La vertu, c’est bien, mais il faut que l’avis soit opérationnel. Il faut se demander, concrètement, à quoi ça va mener. L’avis aura une plus grande portée s’il interpelle directement quelqu’un qui doit poser l'action.»
Des considérations particulières
Lors de la rédaction des constats et des avis, diverses considérations sont prises en compte par les commissions. «La première chose dont il faut s’assurer, c’est que le lecteur ou la lectrice soit en mesure de comprendre la portée de l’avis en le lisant indépendamment du reste du texte, explique M. Morissette. L’avis doit donc pouvoir être bien compris sans avoir à lire la totalité de l’argumentaire qui le précède.»
Le choix des verbes fait aussi partie des éléments à ne pas négliger. «Il y a une recherche linguistique pour trouver le bon verbe d’action, celui qui va amener la personne interpellée à faire quelque chose de particulier, enchaîne-t-il en expliquant la démarche. Quelle est l’action que nous souhaitons qui soit posée concrètement? On ne veut pas juste amener à une réflexion, bien que ça puisse se produire si l’on évoque des politiques publiques. Puis, ultimement, on se demande si l’avis devient une condition d'autorisation du projet ou si c’est un élément qui apporte une plus-value au projet.»
Le processus de rédaction des rapports du BAPE implique plusieurs révisions par des collègues et par un comité de lecture indépendant. «Les avis sont lus, relus et re-re-relus. Nécessairement, nous avons des yeux différents qui nous amènent à bonifier nos avis, à les peaufiner jusqu'à ce qu'ils soient le plus compréhensible possible.»
L’apport des analystes
Dans l’équipe de la commission se trouvent des analystes qui participent activement à la rédaction du rapport. Leur travail est essentiel pour appuyer les commissaires qui en définissent l’orientation générale.
«La ligne éditoriale va correspondre à l’enquête et à la consultation, aux préoccupations que nous avons entendues en séance, précise M. Morissette. Puis, les analystes vont travailler étroitement avec les commissaires afin que nous soyons capables de construire quelque chose de solide et qu’il n’y ait pas de failles dans nos avis.»
Si la rigueur est fondamentale lors de l’enquête, elle l’est encore davantage lors de la rédaction des constats et des avis. «Il est essentiel que nos avis ne comportent aucune faille. Il faut que personne ne puisse dire: oui, mais. Nos avis doivent être rigoureux, solides et bien argumentés. Les analystes sont là pour nous seconder, pour éviter justement qu’il y ait des mais.»
Les rapports du BAPE contiennent plusieurs constats et avis, dont la portée et le nombre varient selon la nature du projet et le regard de la commission. Chaque rapport s’ouvre par une présentation du projet, suivie d’un résumé des opinions exprimées par les participants et participantes. Vient ensuite l’analyse de la commission, qui conduit aux constats et aux avis, puis à la conclusion. Le tout s’inscrit dans une démarche cohérente, ancrée dans la consultation citoyenne.